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| Sujet: Les Cnidaires Lun 5 Nov 2012 - 22:42 | |
| Les Cnidaires
Les Cnidaires forment un groupe charnière entre les premiers organismes multicellulaires et ceux qui sont apparus après. Ils sont également intéressants à étudier à cause de certaines caractéristiques propres à cet embranchement. Leur architecture basées sur une symétrie radiale impose des contraintes importantes sur leur mode de vie. Par exemple, ils n'ont pas de système nerveux centralisé parce qu'ils ne se déplacent pas dans une direction particulière.
Les Cnidaires sont diploblastiques et sont formés de deux couches de tissus: l'ectoderme et l'endoderme. Ils représentent les premiers organismes au niveau d'organisation cellules-tissus. La symétrie radiale et la présence de deux couches de tissus semblent être apparues simultanément, et il n'y a pas d'organismes diploblastiques à symétrie bilatérale.
Les Cnidaires sont des prédateurs qui utilisent toute une variété de cellules caractéristiques (les cnidoblastes) pour accrocher, harponner et engluer leurs proies. Leur cycle biologique est également unique avec une alternance de générations (cycle vital dimorphe) entre le stade polype et le stade méduse. Les différentes classes de Cnidaires se distinguent par l'importance relative de ces deux stades.
Figure 28. Diagramme d'un polype (à gauche) et d'une méduse (à droite). L'ectoderme (à l'extérieur), l'endoderme (à l'intérieur), et la mésoglée (entre les deux) sont colorés. © BIODIDAC
Architecture et classification
Les Cnidaires (du grec knide= ortie et du latin aria= qui ressemble, comme) tiennent leur nom de cellules caractéristiques retrouvées à la surface de leur corps: les cnidocytes (ou cnidoblastes). Ce sont des animaux à symétrie radiale ou biradiale dont la paroi corporelle est formée de deux feuillets (ectoderme et endoderme) séparés par la mésoglée (ou mésenchyme, ou mesohyl). L'architecture générale des Cnidaires n'est pas sans rappeler celle des éponges de type asconoïde. Les deux feuillets cellulaires prennent la forme d'un sac double, les deux épaisseurs du sac étant reliées par la mésoglée. Contrairement aux éponges cependant, les Cnidaires ont de véritables tissus.
La bouche des Cnidaires est généralement entourée de tentacules. Cette bouche mène à la cavité gastro-vasculaire. La plupart des Cnidaires ont deux stades: un stade méduse généralement planctonique, et un stade polype généralement benthique et sessile.
Les méduses sont nageuses et ont la forme d'une ombrelle. La bouche est orientée vers le bas et est suspendue par le manubrium. La cavité gastro-vasculaire est ramifiée dans l'ombrelle qui est bordée de tentacules. Les cnidoblastes sont concentrés sur les tentacules. C'est au stade méduse qu'a généralement lieu la reproduction sexuée.
Figure 29. Schéma d'une méduse. © BIODIDAC
Les polypes ont généralement un corps cylindrique et s'attachent au substrat par leur disque pédieux. La bouche est généralement orientée vers le haut, et est entourée de plusieurs tentacules.
Figure 30. Schéma d'un polype. © BIODIDAC
Les trois classes principales de Cnidaires se distinguent, entre autres, de par l'importance relative des deux formes de vie dans le cycle biologique.
Figure 31. Cycle biologique d'Obelia (Hydrozoaire). Planule, colonie de polype (zoécie) contenant des polypes nourriciers (appelés aussi gastrozoïdes ou autozoécies) et des polypes reproducteurs (appelés aussi gonozoïdes ou gonozoécies), et méduse. © BIODIDAC
Chez les Hydrozoaires (du grec hydra= serpent de mer), les deux formes corporelles sont généralement présentes et sont à peu près d'égale importance (sauf chez l'hydre d'eau douce).
Figure 32. Cycle biologique d'Aurelia. Larve planule, schyphistome, strobile, ephyra et méduse.
Chez les Scyphozoaires (du grec skyphos= tasse) le stade méduse domine et il y a de très petits polypes qui passent souvent inaperçus, alors que chez les Anthozoaires (du grec anthos= fleur), c'est le stade polype qui domine et il n'y a généralement pas de stade méduse. Les coraux et les anémones de mer sont des Anthozoaires. La quatrième classe de Cnidaires (celle des Cubozoaires), est considérée par certains zoologiste comme un ordre de Scyphozoaires. Elle est caractérisée par des méduses ayant une ombrelle cubique et des tentacules groupés aux quatre coins inférieurs de l'ombrelle.
Locomotion et support
Les méduses sont loin d'être d'excellentes nageuses. Les courants marins sont en fait leur principal mode de locomotion. Elles doivent toutefois se maintenir dans la colonne d'eau. Elles y parviennent de façon passive et active. Passivement, les méduses ont une densité très proche de celle de l'eau de mer; elles "coulent" donc lentement. De plus, leur corps en forme d'ombrelle ralentit leur chute vers le fond. Plus activement, elles peuvent nager en contractant leur épiderme, ce qui referme l'ombrelle en repoussant l'eau vers le bas et propulse la méduse vers le haut.
Chez certains Cnidaires coloniaires, comme la galère portugaise (Physalia), la colonie de polypes (ou zoécie) n'est pas sessile, mais flotte à la dérive à la surface de l'eau. Ces animaux forment une colonie très complexe où certains individus se spécialisent pour la reproduction (les gonozoécies) et d'autres pour les fonctions somatiques (les autozoécies). La galère portugaise possède un flotteur rempli de gaz qui lui permet de flotter à la surface, et qui lui sert également de voile.
Figure 33. Détail de l'épiderme d'un Cnidaire. Les cellules épithéliomusculaires forment un muscle longitudinal. © BIODIDAC
La présence de la cavité gastro-vasculaire et d'une bouche qui peut se fermer (contrairement à l'osculum des éponges) permet aux Cnidaires d'avoir un squelette hydrostatique. Ce "squelette" est en fait formé de l'eau qui emplit la cavité gastro-vasculaire et des parois corporelles musculeuses de l'animal. L'eau étant incompressible, le volume de l'animal ne peut changer lorsque sa bouche est fermée. La contraction des cellules épithéliomusculaires de l'épiderme, qui forment des muscles longitudinaux, permet à l'animal de rétrécir et raccourcir ses tentacules. Les cellules du gastroderme forment un muscle circulaire qui, lorsque contracté, permet à l'animal de s'allonger ou d'étirer ses tentacules. La présence de muscles antagonistes (les muscles longitudinaux et circulaires) permet d'étirer activement chaque muscle après sa contraction au lieu d'attendre l'étirement physiologique des fibres musculaires qui est beaucoup plus lent.
Figure 34. Coupe transversale d'une anémone ilustrant les septa complets et incomplets. La présence des septa complets permet de compartimenter le squelette hydrostatique et ainsi d'en augmenter l'efficacité mécanique.
Chez certains Anthozoaires, comme l'anémone de mer, la cavité gastro-vasculaire est subdivisée par des septa. Cette division de la cavité permet d'augmenter l'efficacité du squelette hydrostatique puisque les contractions antagonistes des muscles qui permettent le mouvement peuvent être confinées à une région de l'animal plutôt que de faire intervenir tous les muscles du corps.
Les cellules glandulaires du disque pédieux des polypes sécrètent une substance adhésive qui permet à l'animal de se fixer. Cependant, les hydres et les anémones de mer vont fréquemment se détacher du substrat et faire des culbutes pour se déplacer vers des endroits plus favorables. Dans certains cas, ils vont accumuler une bulle de gaz dans la cavité gastro-vasculaire et flotter entre deux eaux, se laissant amener par les courants marins vers d'autres lieux. Certaines anémones arrivent même à nager en ramant à l'aide de leurs tentacules.
Les coraux utilisent à la fois un squelette hydrostatique pour animer leurs tentacules, et un endosquelette calcaire pour soutenir la colonie.
Respiration et circulation
Les Cnidaires dépendent principalement de la diffusion pour obtenir l'oxygène dont ils ont besoin. Leur corps étant très souvent formé de deux couches de cellules, l'une à l'extérieur, l'autre tapissant la cavité gastro-vasculaire, ils n'ont pas vraiment besoin de système circulatoire. Les cellules amiboïdes de la mésoglée s'occupent du transport des éléments nutritifs des cellules du gastroderme vers celles de l'épiderme.
Alimentation et digestion
Les Cnidaires sont, la plupart, des carnassiers qui se nourrissent de plancton, de protozoaires, et de petits poissons. Ils capturent et immobilisent leurs proies à l'aide des cnidoblastes de leurs tentacules. Souvent ces cnidoblastes contiennent des toxines qui paralysent la proie. La proie est transportée vers la bouche à l'aide des tentacules.
La digestion est à la fois extracellulaire et intracellulaire chez les Cnidaires. Les cellules du gastroderme sécrètent du mucus et des enzymes digestives qui sont relâchées dans la cavité gastro-vasculaire. Les cellules du gastroderme sont flagellées, et le battement des flagelles permet de mélanger l'eau, la nourriture, et les enzymes contenues dans la cavité. Les particules alimentaires partiellement digérées sont ensuite absorbées par phagocytose, et la digestion est complétée à l'intérieur des vacuoles digestives.
Figure 35. Coupe transversale de la paroi corporelle d'un hydre. © BIODIDAC
Chez les Anthozoaires, il y a une structure unique, le siphonoglyphe, qui est une gouttière ciliée à chaque extrémité de la bouche allongée. Cette structure permet de faire circuler l'eau vers l'intérieur de la cavité gastro-vasculaire. Les cellules du siphonoglyphe sécrètent également du mucus qui sert à lubrifier la bouche et le pharynx et ainsi faciliter le passage de la proie vers la cavité gastro-vasculaire. La présence des septa, chez les anémones de mer augmente la surface de contact entre le contenu de la cavité et le gastroderme.
Notez que la bouche est à la fois l'anus chez les Cnidaires. Il n'y a qu'une seule ouverture au tube digestif, et on dit de cet arrangement que c'est un tube digestif incomplet. Cet arrangement n'est pas très efficace car la nourriture partiellement digérée, les rebuts de digestion, et les proies nouvellement ingérées sont mélangées dans la cavité gastro-vasculaire. Il est donc difficile à ces animaux de digérer parfaitement leurs proies car les gradients de diffusion des substances nutritives et des déchets métaboliques de chaque coté des membranes des cellules du gastroderme ne peuvent être maintenus.
Excrétion et osmorégulation
Les Cnidaires marins sont istoniques à l'eau de mer, et n'ont donc pas de problèmes d'osmorégulation. Les déchets azotés sont éliminés sous forme d'ammoniac. L'hydre, qui est dulcicole, est hypertonique par rapport à son milieu. Les surplus d'eau sont éliminés activement par le gastroderme, et les protéines de la membrane des cellules du gastroderme transportent activement les ions pour compenser la diffusion.
Sens et système nerveux
Il n'y a pas de tête ni de cerveau chez les Cnidaires. Le mode de vie sessile ou planctonique implique que l'animal peut venir en contact avec des proies ou de prédateurs dans toutes les directions. Une concentration des fibres nerveuses dans une région du corps n'est donc pas particulièrement avantageuse.
Les Cnidaires ont un système nerveux primitif (réseau nerveux) composé d'environ 100,000 neurones en réseau qui est en contact avec les cellules contractiles de l'épiderme et du gastroderme, et qui forment des extensions au travers de l'épiderme et du gastroderme. Ces cellules nerveuses transmettent les messages aux cellules contractiles. Il y a deux types de réponses musculaires, des réponses lentes et des réponses rapides qui sont obtenues par des nerfs de diamètres différents.
Les Cnidaires possèdent des cellules sensorielles qui réagissent aux stimuli chimiques et tactiles dans l'épiderme et le gastroderme. Les polypes n'ont généralement pas d'organes sensoriels, mais les méduses ont souvent des cellules photoréceptrices et des groupes de cellules permettant de détecter la gravité: les statocystes. Ces structures sont, dans leur forme la plus simple, un petit sac de cellules ciliées contenant du liquide et des statolithes de sulfate de calcium. Les cellules ciliées sont sensorielles et permettent à l'animal de distinguer la direction du fond et celle de la surface.
Figure 36. Détail de l'ombrelle d'une méduse montrant les statocystes et les photorécepteurs.
Reproduction
Typiquement, il y a une phase sexuée et une phase asexuée chez les Cnidaires. La méiose a lieu lors de la production des gamètes, donc les méduses et les polypes sont diploïdes.
Les polypes se multiplient de façon asexuée par bourgeonnement, fission binaire et régénération. Chez certaines espèces, la spécialisation cellulaire est réversible. Les méduses se multiplient de façon sexuée en produisant des gamètes qui sont relâchés dans l'eau. La fertilisation est donc externe. Le zygote se développe en larve planule qui est ciliée et planctonique.
Défenses
Les cnidoblastes des Cnidaires sont un excellent moyen de défense. Les toxines relâchées par les cnidoblastes peuvent provoquer des brûlures douloureuses. Les amateurs de plongée sous-marine qui connaissent les désagréments causés par ces brûlures se munissent d'enzymes protéolytiques (comme les attendrisseurs de viande) comme antidote aux toxines.
L'endosquelette calcaire des coraux leur assure une protection contre les poissons trop voraces.
Écologie
Les Cnidaires sont typiquement carnivores, mais certaines anémones de mer produisent des cellulases qui leur permettent de digérer le matériel végétal. Ils sont à leur tour des proies pour certains poissons, mollusques et crustacés. Les polypes produisent une quantité phénoménale de mucus pour nettoyer leur surface des particules qui sédimentent, et de nombreux poissons coralliens se nourrissent de ce mucus. Certains vers plats digèrent des polypes sans affecter les cnidoblastes et arrivent à intégrer ces cnidoblastes à leur épiderme pour assurer leur propre protection.
L'anémone et le poisson-clown forment un exemple classique de symbiose. Le poisson s'enrobe du mucus de l'anémone, ce qui empêche l'anémone de le reconnaître comme une proie. L'anémone assure protection au poisson qui se nourrit des déchets rejetés par l'anémone. En contrepartie, le poisson sert de leurre pour attirer d'autres proies vers l'anémone.
Plusieurs coraux possèdent des algues photosynthétiques dans des vacuoles. Les algues produisent des sucres qui sont assimilés par les coraux, et débarrassent les coraux des déchets azotés.
| © 2002 Antoine Morin
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