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| Sujet: Chimiothérapie inefficace: une étude révèle le complot mondial ! Ven 27 Mar 2015 - 16:55 | |
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« La vérité mortelle sur la chimiothérapie »Selon des dizaines d’articles sur la toile francophone, une étude scientifique aurait démontré que la chimiothérapie était un « fiasco total ».Cette méthode de traitement des cancers, qui utilisent des molécules agressives pour les cellules cancéreuses, mais également saines (traitement cytotoxique), serait une « tromperie » selon une étude publiée dans le très sérieux journal Nature Medicine.Vous n’avez probablement pas échappé à cet article, publié le 5 octobre 2014 par « Santé Nutrition » intitulé [1] : - Citation :
- « Une étude révèle accidentellement la chimiothérapie comme une fraude… »
Cet article a été partagé plus de 10.000 fois sur les réseaux sociaux, et nous démontre clairement que la chimiothérapie « aide à promouvoir la survie et la croissance des cellules cancéreuse ».Ainsi, la chimiothérapie entraînerait la libération d’une protéine spécifique, la WNT 16b, par des cellules saines agressées par le traitement cytotoxique, qui favoriserait la prolifération des cellules cancéreuses.Selon les auteurs, ces « choquantes découvertes » auraient été sans surprises « ignorées de la communauté scientifique dominante ».Toujours selon cet article à charge contre la chimiothérapie, et preuve scientifique à l’appui, la chimiothérapie serait plutôt un « protocole de création de cancer » plutôt qu’un protocole de traitement contre les cancers.Les conclusions des auteurs de cet article sont sans appel : - Citation :
- « Éviter la chimiothérapie augmente les chances de recouvrer la santé. »
Et pour « celui qui cherche vraiment à guérir » renchérissent les auteurs, il lui faudra utiliser des voies alternatives, comme celle du « Dr. Gerson » ou bien en utilisant des aliments ou nutriments « anti-cancer » comme « le bicarbonate de soude, le curcuma » ou bien de fortes doses de « vitamines C et D ».Voilà qui est dit, et voilà qui fait froid dans le dos.La chimiothérapie ne serait-elle qu’une vaste mascarade ? Ferait-elle réellement l’inverse de ce qu’elle est censée faire ?Quoi qu’il en soit, il est clair que ce domaine-là, il déchaîne les passions sur la toile. J’ai déjà eu l’occasion de régler son compte à certaines citations que l’on peut retrouver sur le net à propos des dangers de la chimio.Mais il faut également garder en mémoire que le domaine de l’oncologie, l’étude des cancers et donc des traitements cytotoxiques est l’un des plus « corrompu » au monde.Maintenant que c’est dit, on va décortiquer l’étude en question mais également l’article sensationnel, pour y voir plus clairUn article sensationnel mais pas exceptionnel…Le seul point positif de cet article, et des dizaines d’autres copies sur la toile, c’est que l’étude en question existe belle et bien [2].Malheureusement, les sites alternatifs qui propagent des articles aux titres et aux révélations extraordinaires oublient bien souvent de citer correctement les références scientifiques.Quoi qu’il en soit, l’étude a été publiée en 2012 par une équipe de plusieurs biologistes américains appartenant à plusieurs laboratoires, dans l’un des plus prestigieux journaux scientifiques médicaux, j’ai nommé Nature Medicine.Ce journal est l’un des plus lus au monde.Il est classé 17ème dans la catégorie « Medicine », juste derrière le fameux Lancet, et occupe la 64ème place mondiale, sur près de 30.000 revues scientifiques.Depuis sa publication en septembre 2012, l’article a été cité 149 fois, ce qui signifie que 149 études publiées jusqu’alors mentionnent les résultats du Pr Nelson et de son équipe.Ce premier constat invalide catégoriquement l’idée selon laquelle ces « choquantes découvertes », comme le mentionne l’article accusateur, auraient été ignorées de la communauté scientifique.Non, malheureusement, c’est tout le contraire. L’étude en question a été publiée dans un journal qui possède l’une des audiences médiatiques les plus importantes, tant auprès de la sphère scientifique et médicale que de la sphère public, et qui plus est, les travaux sont régulièrement cités dans des revues toutes aussi prestigieuses (Nature, Science, PNAS, etc.)Il y a dans l’article de Santé-Nutrition une la volonté manifeste de tromper les lecteurs afin de leur faire croire que des résultats majeurs, exposant les dangers de la chimio, auraient été occultés par la communauté scientifique. Un titre écrit pour manipuler l’opinionMême le titre fait montre d’une volonté incroyable d’induire en erreur les internautes, et de forger des avis négatifs systématiques et non réfléchis contre la chimio.Le terme « accidentellement » nous renforce dans cette idée que jamais une étude sur la cancérologie n’irait chercher les défauts et les contraintes des traitements cytotoxiques.Sauf qu’encore une fois, ce terme qui n’absolument pas été choisi au hasard est complètement faux dans le contexte de cette étude.J’en prends pour preuve l’étude elle-même, le dernier paragraphe de l’introduction des auteurs dans lequel ils précisent les objectifs de leur étude.Ainsi les auteurs nous expliquent qu’ils ont voulu savoir si des cellules saines proches d’une tumeur pouvaient favoriser la résistance de la tumeur aux traitements conventionnels, entraînant ainsi sa progression, à la suite de lésions de l’ADN sur ces mêmes cellules saines.Autrement dit, depuis le début de cette recherche en biomédicale, l’objectif des chercheurs étaient bien de démontrer (ou non) l’effet d’une résistance des cellules du corps humain à la suite de plusieurs thérapies conventionnelles (radiothérapie, chimiothérapie).Vous avez maintenant compris pourquoi ce genre de titre et d’article, qui génère beaucoup de colère et de partage impulsif sur les réseaux sociaux, doit être pris avec des pincettes. De grosses pincettes même. Santé-nutrition : une source super fiable ?Avant de continuer plus en détail sur l’article et l’étude incriminée, vous avez tout de même remarqué que l’article est hébergé chez « Santé Nutrition » ?
- Savez-vous qui est derrière ce média ?
- Connaissez-vous la qualité des articles publiés ?
- Cette source est-elle fiable ?
Avant même de lire cet article, vous devez être immédiatement refroidi par la source, « Santé-Nutrition », un média pour lequel j’ai lancé un appel à boycott national pour lutter contre un piratage et une désinformation généralisée.Bien sûr, Santé-nutrition déchaîne les passions sur Facebook ou ailleurs, et tout n’est surement pas à jeter… Mais tellement de bêtises sans nom, et sans référence aucune, sont publiées sur ce site, que je ne peux qu’inviter à l’ignorer, purement et simplement (ou faire extrêmement attention).D’ailleurs, cet article n’est en réalité qu’une simple traduction, au mot près, d’un article plus ancien publié en anglais sur le site Natural News [3].Comme son jumeau français, cet article a été partagé plus de 13.000 fois sur les réseaux sociaux, et nous montre à travers le fil des commentaires, que les interventions sont minutieusement choisies, comme en témoigne cet imprime-écran : La preuve d’une « tromperie irréfutable » ?C’est bien ce qu’affirment les auteurs de cet article, et nous pousse à croire que la puissance de cette étude, et les résultats choquants qu’elle a été amené à trouver, démontre avec certitude que les traitements conventionnelles seraient une escroquerie, une manipulation de l’industrie pharmaceutique.Pour ceux qui me connaissent, je suis très loin d’être un sympathisant de Big Pharma. Je dois dire qu’elle en prend pour son grade dans mes colonnes, mais je reste néanmoins lucide et objectif pour chaque situation, chaque étude et chaque article (du moins j’essaie).Dans ce cas présent, un point doit être clair pour tous : Jamais ô grand jamais une seule et unique étude ne peut apporter une preuve irréfutable dans un domaine, sur un point précis, et peu importe le domaine d’étude.Afin de prendre une décision éclairée pour un sujet précis, il faut prendre en compte la totalité des études publiées, trier les plus sérieuses des moins sérieuses, comprendre les faiblesses de chacune (faible échantillons, conflits d’intérêts des auteurs, etc.) et en ressortir le message le plus objectif possible.Car malheureusement, ou heureusement, cette étude scientifique ne remet pas en cause la chimiothérapie comme semble le faire croire les articles à sensation de la toile.Que dit réellement l’étude ? Et quelles sont les conclusions que l’on peut en tirer ? Les résultats du Nature Medicine 2012C’est peut-être ce qui est le mieux retranscrit par les nombreux billets accusateurs sur la toile.Très simplement, les auteurs ont montré que les cellules saines aux alentours d’une tumeur maligne pouvaient synthétiser une molécule, la WNT 16b, à la suite de certains traitements chimiothérapeutiques qui endommagent leur ADN, et que cette molécule entraînerait une résistance accrue des cellules cancéreuses aux traitements, et donc favorisait l’expansion de la tumeur.Ces résultats n’ont quelque part rien de surprenant, car il est reconnu dans le domaine de la cancérologie que les traitements chimio peuvent faire l’objet de résistance de la part l’organisme, sous différentes formes, et entraîner le développement des cancers. Des résultats d’ailleurs mentionnés par les auteurs eux même [4].Dans la discussion des résultats, les auteurs énoncent également comment des lésions de l’ADN sur des « cellules autonomes » pouvaient arrêter la croissance cellulaire, et stopper la croissance des tumeurs [5].Ils montrent également comment différentes molécules sécrétées dans le milieu peuvent justement promouvoir les réponses immunitaires de l’organisme, en nettoyant les cellules vieillissantes et en limitant la progression des tumeurs [6] [7] [8].Alors voilà, pourquoi l’étude en question semble plutôt être une bonne nouvelle, comme le souligne un article britannique du centre de recherche sur le cancer, ou un autre plus poussé sur l’analyse de l’étude, qu’une mauvaise nouvelle ?Et bien ces scientifiques américains ont réussi à montrer comment les traitements chimiothérapeutiques pouvaient être inefficace face à certains cancers, mais surtout, ils pointent du doigt les futures directions des travaux pour lutter contre cette résistance (et donc améliorer les traitements).Maintenant que le mécanisme de résistance a été mis en évidence scientifiquement (sécrétion d’une molécule à la suite d’un choc cellulaire au niveau de l’ADN), il est alors possible d’imaginer des expériences pour contrer les effets des lésions de l’ADN dans ces cas bien précis.Que dire des traitements alternatifs ?Bien sûr, à la fin de l’article sensationnel de Santé Nutrition, nous avons une série de recommandations naturelles pour lutter sainement contre tous les cancers.On va revenir sur l’efficacité de ces recommandations.Efficacité non prouvée.Les « Sceptiques du Canada » ont fait un remarquable travail sur ce sujet, et démontrent clairement que ce protocole n’a jamais été validé scientifiquement. Il ne repose que sur des témoignages et des « comptes rendus personnels de Gerson lui-même ou d’autres praticiens de sa méthode » selon les auteurs de cet article.
- La cure au bicarbonate de soude ?
Efficacité non prouvée.Cette théorie repose sur le fait que la cause des cancers serait un champignon, Candida albicans, et que le bicarbonate de soude devrait être pris par voie orale, ou toute autre voie, pour lutter contre lui et donc contre le cancer.Ce protocole n’a jamais été validé scientifiquement.
- La cure de vitamine C et D ?
Efficacité non prouvée.Comme le souligne très bien « Dynamithe » dans son billet, ces vitamines pourraient être carencées à cause de certains cancers, et il apparaîtrait donc sage de se supplémenter, mais elles ne seraient pas des cures pour autant contre le cancer.Un article de Passeport Santé nous signale qu’au niveau de la prévention des cancers, le rôle de la vitamine C n’est pas démontré.La ligne rougeAttention, je ne suis pas un pro-chimio ou traitements médicamenteux en tout genre. Je préfère le répéter au risque de saouler l’audience. Ce billet sert avant tout à rétablir une certaine vérité sur l’actualité scientifique (bien que l’étude en question soit quand même vieille), et à vous montrer comment on peut aisément se faire manipuler en :
- Choisissant les bons termes, les bons mots qui vont créer colère et haine
- Manipulant les résultats scientifiques d’une étude pour faire valoir ses idéaux
- Proposant des méthodes alternatives qui n’ont aucune validité scientifique.
Alors bien sûr, les prises de compléments alimentaires, la pratique régulière d’une activité sportive, la pratique d’un jeûne ou d’une restriction calorique, une alimentation variée et équilibrée sont des points essentiels pour maintenir un bon état de santé, mais cela ne nous protège malheureusement pas à 100%, d’un risque de cancer. Références[1] Voire l’article « Une étude révèle accidentellement la chimiothérapie comme une fraude – les tumeurs se développent plus rapidement après la chimio! » du site Santé Nutrition.[2] Sun, Y., Campisi, J., Higano, C., Beer, T. M., Porter, P., Coleman, I., … & Nelson, P. S. (2012). Treatment-induced damage to the tumor microenvironment promotes prostate cancer therapy resistance through WNT16B. Nature medicine, 18(9), 1359-1368.[3] Voir l’article « Study accidentally exposes chemotherapy as fraud – tumors grow faster after chemo!” sur Natural News[4] Biswas, S., Guix, M., Rinehart, C., Dugger, T. C., Chytil, A., Moses, H. L., … & Arteaga, C. L. (2007). Inhibition of TGF-β with neutralizing antibodies prevents radiation-induced acceleration of metastatic cancer progression. Journal of Clinical Investigation, 117(5), 1305.[5] Michaloglou, C. et al. BRAFE600-associated senescence-like cell cycle arrest of human naevi. Nature 436, 720–724 (2005).[6] Acosta, J.C. et al. Chemokine signaling via the CXCR2 receptor reinforces senescence. Cell 133, 1006–1018 (2008).[7] Kuilman, T. et al. Oncogene-induced senescence relayed by an interleukin-dependent inflammatory network. Cell 133, 1019–1031 (2008).[8] Xue, W. et al. Senescence and tumour clearance is triggered by p53 restoration in murine liver carcinomas. Nature 445, 656–660 (2007)- See more at: http://www.dur-a-avaler.com/chimiotherapie-inefficace-fraude-cancers-tumeurs-etude-complot-mondial/#sthash.KiX36PT6.dpufUn article de Jérémy Anso | |
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